Fin des certitudes et des managers, faim de leaders
Deux leaders cultivent le bonheur de leurs équipes
Cultiver les hormones du bonheur
Simon Sinek, dans deux de ses conférences TED les plus suivies, nous rappelle que la chimie du bonheur quotidien n’a guère évolué depuis que nous avons quitté la grotte Chauvet (- 25 000 ans). Voici comment, au fil de la journée, notre cerveau se shoote, littéralement ! Voici comment il s’inonde de quatre hormones naturelles :
- Après 20 minutes de course — derrière le lion, bien sûr — notre cerveau s’envoie un gros shoot d’endorphines (endor-phine = morphine endogène !). Cette drogue naturelle va masquer la douleur (regardez les joggers). Car la première condition, ou la première étape, dans la construction du bonheur, est de ne pas souffrir. Mais dans les bureaux du XXIe siècle, on ne court guère, si ce n’est au sens figuré.
- Quand vous réussissez à attraper le lion (i.e. à atteindre le but que vous vous êtes fixé), c’est l’extase. Pour produire cette sensation, votre cerveau s’envoie un shoot de dopamine — hormone fournie par le circuit de la récompense (regardez les finishers de toutes les courses). Et quand vous signez un nouveau contrat, ou que votre powerpoint vous paraît génial, vous êtes tout près du chasseur de lion posant debout à côté de la bête terrassée d’une flèche adroite.
- De retour à la grotte, arrive le temps du repas partagé. Autour du feu, chacun s’active, aide les autres, et se sent bien. Les cerveaux de l’assemblée se shootent à la sérotonine[1], hormone de la confiance mutuelle. Le chasseur-leader a produit le ciment du groupe (la confiance). C’est sur la production de cette hormone-là que les bons leaders du XXIe siècle ont un impact.
- Le soleil a disparu ; fin du repas, on couche les enfants. Les caresses déclenchent chez le caressé la production d’ocytocine, l’hormone de l’attachement (les Grecs appelaient ‘’philia’’ cette forme d’amour). A l’âge adulte, l’orgasme en libère de belles doses, accompagnant la dopamine (remontez au §2 et à l’hormone du plaisir).
Le leader contribue à la production de sérotonine dans le groupe
Le leader de tout groupe — y compris dans le monde du business — est un catalyseur de la production d’hormones du bonheur. Son rôle se concentre surtout sur la n°3, la sérotonine.
L’humilité fait partie de ses qualités de base, évoquées par Simon Sinek dans son livre Pourquoi les vrais leaders se servent en dernier.
Le livre trouve son point de départ dans cette tradition, toujours respectée chez les Marines américains, qui veut que les officiers, au mess, se servent en dernier.
Mais pas besoin de traverser l’Atlantique pour croiser des leaders modestes. Un exemple ? Voici l’interview d’Alice Holzman, directrice générale de Ma French Bank — la toute nouvelle filiale de La Banque Postale. On aimerait faire partie de son équipe.
Interview d’Alice Holzman : Role model sans le savoir,
qui évoque sans chichis l’ambiance qu’elle a créée pour la création de la néo-banque qu’elle dirige
Le leader contribue à la production de dopamine dans le groupe
Le lion peut vous échapper, ce n’est pas grave. Le chasseur qui emmène le groupe peut tomber, ou perdre la trace du lion, ce n’est pas grave. Ce n’est pas grave si ce chasseur a l’énergie pour se relever et poursuivre son effort.
Le leader, dit-on, montre le chemin.
Corrigeons l’adage.
Ce n’est pas la netteté du chemin qui compte, pour motiver l’équipe à avancer, derrière le leader ; c’est le fait que le leader avance (sur le chemin qu’il ouvre) : on le suit.
Là-encore, pas besoin de traverser les millénaires pour trouver des leaders de la chasse impressionnants de ténacité.
Un exemple ? Un ingénieur des télécoms qui a « chassé des lions » avec des technologies qui ont tellement changé en peu de temps ; et qui a su se relever autant de fois (+ une) qu’il est tombé. Son tout dernier lion a belle allure.
Pascal Thomas, cofondateur de Futura Gaïa le dit sans ambages : « Partir avec des certitudes, c’est le meilleur moyen de se prendre un mur », et évoque ses échecs, sources de ses réussites
Pascal Thomas entraîne le lecteur avec lui, et le lecteur tombe avec lui, et l’on se relève avec lui, plusieurs fois de suite, « à l’américaine » : un tel leader est évidemment shooté aux endorphines, qui lui fournissent le cran pour repartir. Mais il est aussi régulièrement inondé de dopamine, l’hormone qui signe la récompense dans nos esprits ; et il aide ses collaborateurs à ressentir eux aussi le bonheur de la réussite, car il sait que les échecs ne sont que les étapes qui précèdent les succès.
Cette série sur le leadership par temps incertains se clôt ainsi sur ceux qui nous embarquent : par leur énergie et leur humilité — les deux en même temps !
[1] Le manque de sérotonine se traduit par le manque de confiance en soi, la dépression ; relisez le dernier roman de Michel Houellebecq, qui a pour titre Sérotonine.